mardi 8 novembre 2016

Fractales



© Franck Queyraud Le Rhin, ses nuages et tout ce qu'on ne dit pas

Sa venue au monde fut comme la traversée d’un tunnel long et obscur. Elle en garde un goût pour les voyages immobiles et solitaires. Enfant, on la dit timide et renfermée ; on la trouve taciturne. Sa compagnie préférée, les personnages des histoires qu’on lui raconte puis des romans qu’elle lit.

Lorsqu’elle franchit la porte de la maison, elle marche en regardant ses pieds au bout desquels s’ouvre un univers de surprises et de rencontres.
Sur les trottoirs de la ville, elle recherche les pousses vertes dont le combat entêté contre le goudron la réjouit et elle tente de décrypter les traces laissées par l’humanité si peu soucieuse de respect. Dans l’herbe, elle part en quête de trèfles à quatre feuilles, observe les insectes affairés et cueille parfois quelques fleurs qu’elle laisse sécher entre les pages des livres.
Elle rapporte toujours dans sa poche quelques cailloux dont elle aime les couleurs et les formes, dans ses oreilles les voix des hommes et les sons de la nature.

Un jour que ses yeux précèdent ses pas sur le chemin, elle trébuche et tombe. A plat ventre dans l’herbe, elle se retourne, voit le ciel, découvre les nuages et leur course, elle apprend la fuite éperdue. Elle part vers l’horizon. Chaque regard lui révèle que l’univers qui se déroulait au bout de ses pieds est l’abrégé du cosmos tout entier.

Elle, n’est qu’une partie du Grand Tout. Elle suit les nuages et le fleuve jusqu’à la mer.
Dans le sable de la plage, elle cherche les cailloux lissés par le flux et le reflux, les coquillages nacrés par l’alchimie de l’eau et du vent. Elle déchiffre les dessins de l’écume et ceux laissés par la mer lorsqu’elle se retire. Elle écoute le ressac des vagues.

Silence.

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Ce texte a été publié pour la première fois sur « Mémoire silence », le blog de Franck Queyraud, dans le cadre des Vases Communicants de septembre 2016.





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