©
Eva Truffaut, série « Polaroids ».
|
Les
hortensias sont blancs sous les fenêtres.
Blanc
couleur lame de rasoir.
Blanche,
la coupure. Césure. Temps mort.
Souvent
je me réveille en sursaut. Les souvenirs.
Je
sais que j'arrive à Paris en automne ; je suis jeune encore. Les
rides sous mes yeux n'ont pas atteint le regard. Les joues sont
roses.
Je
ne sais de qui j'ai hérité l'âme fiévreuse. Lorsque je croise le
chat des voisins, j'ai envie de l'attraper et de le jeter contre le
mur jusqu'à ce qu'il éclate.
J'ai
du mal à différencier les pulsions meurtrières des pulsions
suicidaires. J'aimerais tellement tuer.
La
vie est lourde comme du linge mouillé. Je parle de l'ennui, de la
fatigue. J'ai toujours eu un penchant certain pour l'ennui, il me
fascine et me happe, comme le reflet d'une arme.
©
Eva Truffaut, série « Polaroids ». |
L'automne
chaque année marque la fin du supplice de la chaleur.
Celle
qui me fait me trainer comme un poids mort, une déchéante, une
déchirée. Je n'ai pas connu la froideur véritable des paysages de
mes origines, de la mer, et pourtant je suis comme ce pays que je ne
connais pas, austère et secrète.
Je
ne me baigne pas dans la mer. Elle est froide, elle est ironique,
elle est dangereuse. Elle se moque de moi. La plage est une
étendue grise et morose, couleur de morgue.
Aujourd'hui
je me penche à la fenêtre, les hortensias sont roses. J'ignore
combien de temps a passé.
©
Eva Truffaut, série « Polaroids ».
|
La
continuité dans le changement, ou le contraire peut-être…
François Bon a été à l’origine de ces échanges le premier vendredi de chaque mois, que j’ai découverts alors qu’ils étaient coordonnés par Brigitte Célérier ; Angèle Casanova a pris le relais à partir de novembre 2014. C'est à mon tour de remplacer Angèle, j'espère être à la hauteur et me montrer digne de sa confiance.
Aujourd’hui,
j’ai donc le très grand plaisir de recevoir Anne-Sophie Bruttmann
pour ces Vases Communicants, qui sont les premiers pour elle, et de
publier sur La dilettante « Les hortensias sont blancs sous les
fenêtres ».
Je
la remercie d'accueillir mon texte « comme une main ouverte »
sur son blog « annesodiversetvariations ».
La "mer ironique" me plaît beaucoup : l'envie de tuer peut s'y adoucir.
RépondreSupprimer