(C) Françoise Renaud |
Pour
bricoler, il n'était pas à son affaire mais il aimait bien y mettre
son grain de sel quand quelqu'un d'autre s’y collait. Dans ces
moments-là, nous le surnommions « la mouche du coche ».
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Mais
le jardin, là c'était autre chose. Ne sait si on doit parler de
passion ou de lien à la terre. Lui qui, jusqu’à son retour du
service militaire, s’était occupé à divers travaux agricoles,
descendait chaque jour dans les entrailles de la terre -il était
mineur de fond. Il consacrait son temps libre aux jardins potagers
agrémentés de quelques fruits et fleurs.
Dans
mon souvenir, il en a toujours fait au moins deux et là il ne me
viendrait pas à l’idée de remplacer faire
par un autre verbe comme l’on nous y incitait dans les exercices
scolaires. Faire le jardin, c’est tout à la fois l’agencer et en
prendre soin.
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Les
outils n’étaient pas aussi bien rangés qu’ils le sont là. Leur
place était contre la paroi du garage et ils étaient chargés sur
la brouette ou dans le coffre de la voiture en fonction des travaux
qu’il projetait.
Des
verbes fusent : biner, désherber, bêcher, piocher, ratisser,
sarcler, planter, fumer, repiquer, labourer, faucher… presque tous
corrélés à des outils que je serais incapable de reconnaître.
La
pelote, la grosse ficelle qu’on déroule, on la tend entre les deux
piquets pour que le rang soit droit ; un jeu d’enfant auquel
nous affectionnions de nous prêter. Suivre le fil avec la pioche,
creuser un léger sillon pour accueillir les graines. Les recouvrir,
arroser légèrement, voir naître une rivière dérisoire dans la
terre sèche.
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Deux
verbes nous faisaient prendre la poudre d’escampette :
cueillir
et ramasser.
Les
cornichons d’abord, il les récoltait aux aurores afin qu’ils ne
forcissent pas sous la chaleur du soleil -c’est vrai que chez nous
les cornichons nous les adorons quand ils sont petits. Il fallait les
brosser avant de les immerger dans la marinade que nous préparions
avec ma mère.
Le
pire, notre cauchemar d’enfants : les haricots verts que nous
devions équeuter et effiler. Par bonheur, il les plantaient
habituellement dans le jardin de mon oncle qui vivait avec mes
grands-parents. Ils étaient toujours prêts, en le voyant passer
avec les seaux remplis de ces maudits légumes, à nous délivrer de
cette corvée.
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Mon
frère, à qui il a transmis cette inclination, a pris le relais. Il
m’arrive de me régaler de ses exquises productions légumières.
S’ouvrent alors les vannes du plaisir des mots, des gestes et des
goûts retrouvés.
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Ce
texte a été publié pour la première fois sur « Terrain
fragile »,
le blog de
Françoise Renaud,
dans le cadre
des
Vases
Communicants d'août
2016.
J'ai toujours l'image de ton père assis derrière la maison, un torchon sur les genoux et nettoyant patiemment les cornichons.
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