samedi 19 juillet 2025

Retrouver le goût…

 

En août 2007, j’achète un Panasonic FX-10. Depuis un peu plus d’un an, je suis la tatie d’un petit garçon à qui je rends visite très régulièrement ; je le prends en photo dans les moments partagés avec lui et ses parents. J’utilise des appareils photos jetables et j’en ai marre. Alors, j’achète ce tout petit appareil, il est léger, il tient dans un sac. Je ne sais pas encore qu’il ne quittera pas mon sac jusqu’à ce qu’il me lâche des années plus tard. Je ne sais pas encore que pendant des années je vais prendre des photos quasi quotidiennement documentant ainsi mes promenades au fil des lieux et des saisons, ma vie professionnelle et personnelle. Quelques semaines plus tard, je fais également l’acquisition d’un reflex mais c’est lourd et encombrant, sans compter qu’il y a plusieurs objectifs, qu’il faut en changer pour faire différents types de photos, ça devient moins spontanée, moins pris sur le vif. Lui aussi va finir par me lâcher en 2020, en plein confinement. Un message indique qu’il faut aller chez le photographe pour la réparation ; or, le vrai photographe chez qui je l’ai acquis ne rouvrira pas les portes de sa boutique après la crise Covid.

 

Cette photo n’est peut-être pas la première prise avec cet appareil compact ni la première postée sur Flickr. Ce dont je suis certaine c’est qu’elle a été prise lors de ma première promenade photographique en bords de Marne, c’était à Maisons-Alfort où j’habitais alors. Je n’ai jamais su qui était l’auteur de ce buste, je le nomme « Le Cri » car il me fait penser, allez savoir pourquoi, au tableau d’Edvard Munch. Je l’ai photographié plusieurs fois. La photo qui exprime le mieux mon sentiment est celle prise sous la neige, en janvier 2009. Elle reflète à la fois ce que je ressens intérieurement et la sympathie que j’éprouve pour tout humain qui crie silencieusement ou pas, tout humain qui crie contre la misère, contre la violence, contre la guerre, contre tout ce qu’il ne veut plus subir.

 

Depuis la mort du Panasonic, j’ai eu plusieurs autres appareils compacts mais aucun ne m’a autant conquise, avec aucun je n’ai lié une telle complicité quotidienne, une telle intimité. La plupart du temps, ils restent sur la console de l’entrée sans que j’y prête attention ou que je me dise « tiens, si je reprenais un compagnonnage avec celui-là ». Et puis, il y a eu l’année 2020, elle a vraiment été une année d’assèchement, ne plus pouvoir sortir librement, aller où je veux quand je veux a mis un coup d’arrêt presque simultané à mon désir de photographier et à celui d’écrire. M’exprimer dans ce monde qui n’a pas eu d’après humainement, socialement et écologiquement acceptable moi m’a paru vain. Aujourd’hui, avec le défi d’été, je retrouve le goût des mots. Je vais peut-être aussi retrouver celui des images et ne plus me cantonner quasi exclusivement à des photos d’œuvres ou de détails qui me vont à l’âme ou au cœur lors des visites de musées ou d’expositions, retrouver le goût de la vie et des gens en sortant plus souvent à leur rencontre.

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Texte écrit avec Les Mots dans le cadre du défi de l’été 2025 : « du petit plongeon au grand bain ». « Semaine 1 : Trempez un doigt dans la piscine, avec un premier désir d'écriture ».

Jour 6 : Vous avez dans votre téléphone (si vous n’avez pas de téléphone, vous avez des photos dans des albums ou en vrac dans une boîte à chaussures). Prenez la plus ancienne photo présente dans votre galerie et écrivez un texte dessus, pas une description mais cherchez l’émotion qui se produit au moment où vous la regardez à nouveau.

 

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