mardi 9 août 2016

Dénoyauter les cerises...


Bol de cerises © JM Delannoy



Je ne m’en souviens pas, le souvenir pour moi, c’est le récit de cette scène tant de fois évoquée par ma mère. Je dois avoir trois ou quatre ans. Elle entre dans la cuisine et se trouve face à ma sœur, celle qui est née quatorze mois après moi, le menton dégoulinant de jus de cerises. Elle est bouleversée, elle dit que c’est insensé de lui avoir donné des cerises, qu’elle risque d’avaler un noyau et de s’étouffer. Je lui montre alors les noyaux abandonnés sur la table et comment je les ai séparés de la chair avant de lui donner la becquée.

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C'est la fête des mères. Elle est là, allongée sur un lit, elle ne prononce que des phrases incohérentes et murmure des bribes de prières… Il fait chaud. Elle refuse de boire l’eau gélifiée qu’on lui propose ; sa bouche est sèche. C’est décidé, je dénoyaute quelques cerises que j’ai apportées. On m’a dit que c’est de ma responsabilité ; on craint une fausse route. Elles sont fraîches. Elle les a toujours aimées ainsi. Noires, pulpeuses et juteuses. L’espace d’un instant, un sourire.






8 commentaires:

  1. souvenirs beaux et tristes mais tendres d'une fille soigneuse et attentionnée, dès le début

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  2. Emouvant souvenir, merci pour ce partage…

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  3. Le goût des clafoutis aux cerises de ma mère...

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  4. d'une douceur qui remue et pourtant fait du bien, si délicat et tendre

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  5. Merci à toutes et tous pour la lecture attentive et les commentaires. C'est un partage important pour moi. Les échanges pour les Vases Communicants et les ateliers d'été de François Bon m'aident beaucoup à "oser"... Bonne soirée à vous.

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