mardi 13 septembre 2016

La clameur du petit cirque s’était tue (Back to basics 5 | la route rouge de Rimbaud)




Sur la place, la clameur du petit cirque s’était tue. Le silence et le rituel tintement, balise du temps qui passe, au clocher de l’église, avaient repris leurs droits.

La veille, le clown a rangé son nez rouge dans la boîte à maquillage et l’auguste son chapeau blanc conique dans son carton, les acrobates ont démonté avec précaution le trapèze et le trampoline, le funambule a minutieusement enroulé son fil, l’écuyère a plié soigneusement son costume pailleté dans la valise bleue,... Dans la douce lumière dorée du soleil vespéral, ils ont démâté puis enroulé le petit chapiteau rouge et jaune. Entre chien et loup, juste avant que n’apparaisse le halo bleuté de la lune, ils ont chargé tout le matériel dans le grand camion.

A l’aube, ils ont conduit leur modeste ménagerie dans les cages. Dans le petit matin blanc, ils ont attachés les longues caravanes aux grosses voitures ; les portières ont claqué.

Dans l’éclat verdâtre des réverbères, ils passent devant l’église. La lumière éclaire faiblement la fillette qui a passé quelques jours dans l’école du village. Derrière la vitre, son visage est illuminé par un sourire. Sur ses genoux, la petite volière avec les colombes de son père, le magicien. Elle emporte un peu de la chaleur des bras d’une fillette gadji qui lui a accordé son amitié malgré la peau couleur acajou, la saleté et la robe défraîchie.

Ils partent vers un autre bourg. Reviendront-ils l’an prochain ? Sera-t-elle encore avec eux ? L’empreinte d’une main à la peinture rouge esquissée dans les toilettes du préau est-elle un signe laissé à l’intention de son amie ?



Ce texte a été écrit dans le cadre du cycle d'ateliers d'écriture de l'été 2016 : « back to basics, 5 | la route rouge de Rimbaud » proposé par François Bon, sur le Tiers-Livre.




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